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Plus de 4 ans après, l’affaire des 3 Grecs passe enfin au tribunal des prud’hommes
vendredi 8 juin 2012, par
En 2008, 3 ouvriers grecs (Léo, Boris et Nikos) travaillant pour une sous traitance d’Aker Yards (chantier naval) étaient contraints de faire 19 jours de grève de la faim pour obtenir le paiement de leur salaire (du 14 mars au 1er avril 2008). Après le décès de Nikos (le 14 avril 2008, à son retour en Grèce), Léonidas (avec son avocate franco-grecque) a décidé de porter plainte aux prud’hommes de Saint-Nazaire contre STX (successeur d’Aker Yards) pour obtenir justice et réparation.
Pendant 4 ans, Léo s’est battu pour obtenir enfin la condamnation des pratiques couvertes par Akers Yard, pratiques qui s’apparentent à une forme d’esclavagisme moderne : pas de contrat de travail, non respect du code du travail, licenciement abusif et non paiement des salaires dûs...
Cette affaire qui devait passer en jugement le 15 septembre 2011, a été renvoyée une première fois au 2 février 2012, puis au 7 juin 2012...
Ce 7 juin, l’avocat de STX à tenté d’obtenir un nouveau renvoi en prétextant qu’il venait de recevoir (4 ans après !) les contrats de travail des 3 grecs (écrits en Allemand)... et qu’il avait besoin d’un nouveau délai pour les présenter au dossier.*
Le tribunal a refusé cette manoeuvre dilatoire et enfin le procès a pu s’ouvrir. La plaidoirie de l’avocate de Léo a été brillante, émouvante et implacable.... Elle a décrit les conditions de travail et d’hébergement des travailleurs grecs (insalubrité, horaires déments). Elle a détaillé les multiples entorses au code du travail (pour preuve : les constats de l’inspection du travail)...
Elle a démontré l’entière responsabilité d’AKER YARD,
1) comme donneur d’ordre, Aker avait le devoir de veiller au respect de la législation française, en ne le faisant pas, elle se faisait complice de pratiques scandaleuses...
2) comme bénéficiaire de ces "montages" illégaux qui lui permettent d’obtenir de la main d’oeuvre à bas coût,
Léo est intervenu pour dire que la grève de la faim, avait été le seul recourt possible pour affirmer leur dignité d’hommes et de travailleurs face au mépris de leur employeur, l’indifférence des pouvoirs publics et des autorités... Il a rappelé aussi les nombreuses intimidations, pressions et menaces dont ils ont été l’objet. Heureusement, a-t-il souligné, il y a eu le soutien chaleureux de la CGT et du collectif de solidarité (dont le MRAP-région nazairienne)....
L’avocat de STX, lui au contraire a tenté de laver Aker Yard/STX de toute responsabilité...
Voici comment il à répondu à l’argumentation de l’avocate des 3 grecs (un chef d’oeuvre de mauvaise foi !)
. Absence de contrat de travail donc absence de preuve qu’il existait un lien de subordination entre Aker Yards et les salariés
. Badges des salariés au nom d’AkerYards : c’est normal, car tous ceux qui rentrent sur le chantier doivent avoir un badge, mais ce badge est géré par la sous traitance...
. Au bout de 19 jours de grève de la faim, Aker Yards règle les salaires dûs : ce n’est pas la preuve que Aker Yards avait une responsabilité envers les 3 travailleurs grecs... c’est un "geste humanitaire" rendu nécessaire par la "défaillance du sous traitant" !
Puis il a contesté la compétence du tribunal dans cette affaire. Absence de compétence territoriale et de droit.. puisque les sous traitances étaient des entreprises basées en Allemagne et dépendant du droit Allemand !!!
L’avocate de Léo a aussitôt dénoncé cette nouvelle manoeuvre : cette contestation de la compétence du tribunal qui aurait dû être soulevée au début de la procédure est totalement irrecevable légalement ( ce qui a été noté par le greffe).
Le jugement est mis en délibéré le 8 novembre 2012.
Conclusion :
Aujourd’hui, Léo, tous ses soutiens, le droit, la dignité des travailleurs ont remporté une victoire :
1) Les manoeuvres dilatoires de STX ont échoué, le procès à eu lieu. Aker Yards/STX ont été confrontés enfin à la justice, leurs pratiques scandaleuses dénoncées publiquement...
2) L’attitude arrogante, cynique, insensible à l’humain, de l’avocat de STX est un révélateur de la complicité objective de la direction de l’entreprise avec des pratiques qui bafouent la loi et la dignité des travailleurs.
3) Enfin, après 4 ans de sacrifices, de doutes, Léo a pu s’exprimer publiquement, dénoncer la réalité de l’exploitation que lui et ses camarades et que beaucoup d’autres ont subie et subissent encore... Grâce à son courage, sa détermination, les sans grades, ceux qu’on écrase, qu’on exploite, que l’on méprise ont pu se faire entendre...
Certes, l’issue reste incertaine, le combat sera long et semé d’embûches mais , c’est un immense encouragement à poursuivre pour ceux qui n’ont jamais baissé les bras et à relever la tête pour ceux qui souffrent,et se taisent encore...
(*) les 3 grecs ont toujours nié avoir signé de tels contrats, en 2008. Elbe, l’entreprise de sous-traitance qui les employait a tenté de faire croire le contraire en présentant 3 contrats prétendument signés par les intéressés... La vérification faite par l’inspecteur du travail a révélé la supercherie : les signatures sur les contrats n’étaient pas celles des salariés, mais l’imitation de la signature apposée sur leur carte d’identité par l’officier de police...
Revue de presse :
Ouest-France
Saint-Nazaire-Infos
Presse-Océan
Le Grand Soir