Accueil > le MRAP > le Pont Transcouleur > le Pont Transcouleur n° 92, juin 2013
le Pont Transcouleur n° 92, juin 2013
mercredi 5 juin 2013
Edito : Le mot « race » disparaît de la législation française.
Le racisme, lui, est toujours bien là !
Le 16 mai 2013, l’Assemblée Nationale a adopté une loi supprimant le mot « race » du Code pénal, du Code de procédure pénale et de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Pour le rapporteur de la proposition, Alfred Marie-Jeanne, « le mot « race », ce concept aberrant, ayant servi de fondement aux pires idéologies, n’a pas sa place dans notre ordre juridique ». Il reste à supprimer ce mot de la Constitution, ce qui était l’une des promesses de François Hollande pendant la campagne présidentielle.
Le MRAP se réjouit de cette initiative : il y a longtemps que ses militants affirment qu’il y a une seule race, la race humaine.
Mais, hélas, la disparition du mot n’entraînera pas la disparition du racisme !
Les thèses racistes et xénophobes prennent aujourd’hui une large place : 69% des Français estiment qu’il y a trop d’immigrés (contre 47% en 2009). Le rapport de la CNCDH (Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme) indique une hausse de 23% des menaces et actes racistes. On constate également une importante banalisation de l’islamophobie : dans une enquête IPSOS de février 2013, 74% des sondés considèrent par exemple que « la religion musulmane n’est pas compatible avec les valeurs de la République ».
Ces derniers mois, ont resurgi des idées profondément réactionnaires sur la société : le mouvement d’opposition au mariage pour tous a souvent débouché sur des manifestations d’homophobie violentes et inacceptables. Trop de media ont prêté une oreille complaisante aux slogans qui s’exprimaient à cette occasion. Par contre, on les a peu entendus parler des milliers de manifestants qui défendaient l’égalité des droits pour toutes et tous.
Les partis d’extrême-droite, le Front National exploitent le désarroi produit par le chômage, les emplois précaires, les temps partiels imposés qui entraînent une désespérance sociale, une angoisse de l’avenir, touchant une partie croissante de la population, en France, comme dans les autres pays européens.
Le Front National se présente comme un recours possible. Ses diatribes contre les gouvernants, l’exploitation des cas de corruption trouvent des échos, masquant son véritable programme, anti-social , raciste et xénophobe et détournant la colère contre les immigrés et les étrangers.
En même temps, une partie de la droite est visiblement tentée de le rejoindre pour des raisons autant idéologiques qu’électoralistes.
Dans ce cadre inquiétant, le combat contre le racisme est aujourd’hui un enjeu majeur pour les organisations démocratiques comme la nôtre.
Pourtant, les réponses gouvernementales ne sont pas à la hauteur de cet enjeu !
Le Ministre de l’Intérieur appelle à « poursuivre le travail de démantèlement et d’évacuation des campements roms » , prétendant que ces familles refusent de s’intégrer et allant ainsi dans le sens de l’extrême-droite qui diffuse de fausses rumeurs sur les avantages dont bénéficieraient les Roms et les présente systématiquement comme des délinquants. Des solutions existent et doivent être recherchées sur tout le territoire pour que ces citoyens européens voient leurs droits reconnus et puissent trouver des conditions d’existence dignes.
La régularisation des sans papiers reste une revendication majeure du MRAP. Mais, la circulaire du 28 novembre 2012 dresse des obstacles insurmontables : exigence de 5 ans de présence en France alors que des familles sont là depuis 3 ou 4 ans, que leurs enfants ont eu le temps de s’intégrer dans les écoles et d’apprendre le français ; nécessité de présenter des preuves de travail, contrats ou fiches de paie alors que, justement, ces personnes n’avaient pas le droit de travailler et étaient réduites à un travail clandestin avec toutes les situations d’exploitation que cela suppose. Là encore, les militants du MRAP continuent d’exiger une autre politique d’immigration et de défendre le droit de ces personnes à s’installer durablement.
Et que dire du droit de vote des résidents étrangers ! Le 16 mai dernier, le Président de la République déclare : « après les élections municipales, comme il n’y aura plus d’enjeu, un texte sera soumis au Parlement, et le Parlement en fera l’adoption qu’il souhaite ». De qui se moque-t-on ? Cette reculade est injuste et scandaleuse : elle écarte d’une véritable citoyenneté des étrangers qui travaillent ici, paient des impôts, participent pleinement à la vie sociale dans leur commune. Ils doivent aussi participer à la vie démocratique. Le MRAP va continuer à exiger ce droit avec le Collectif Droit de vote 2014.
Devant les dangers qui menacent notre société, notre vigilance doit être de tous les instants, notre mobilisation ne peut pas faiblir !