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[Nantes] Plainte pour injures à caractère raciste
lundi 14 septembre 2020
Le comité de Nantes du MRAP porte plainte pour injures à caractère raciste et destruction de biens d’autrui visant les familles roumaines d’origine rom.
Chronique du racisme ordinaire
Depuis deux ans, 27 familles roumaines vivaient sur un terrain de Saint-Herblain. Le maire leur en avait promis la stabilisation. Mais, menacées d’expulsion, l’électricité coupée, elles décident de partir dans la nuit du 10 au 11 juillet malgré l’état délabré de certaines caravanes. Le 11 juillet, elles se retrouvent sur un ancien terrain agricole à Orvault. Les menaces commencent. Le maire d’Orvault propose une médiation. Si le départ s’avère inéluctable du fait des tensions, l’idée est de temporiser pour trouver une solution d’ici la fin septembre.
Certains habitants du quartier voisin organisent une manifestation le samedi 1er août contre le "camping sauvage". D’autres s’y opposent au nom de la défense des Droits Humains. Plusieurs représentants d’associations du collectif Romeurope proposent de discuter.
Dans l’après-midi, alors que les familles déjeunent pour l’anniversaire d’un petit garçon, sans musique et sans avoir préparé de cochon (on leur avait reproché), une dizaine d’adolescents, des bouteilles de bière à la main, parfois accompagnés de leurs parents, crient : "Qu’ils crèvent tous cette sale race, qu’ils dégagent ces gros porcs, qu’ils meurent électrocutés, j’ai plus de respect pour les chiens que pour ces gens là…" La police nationale est présente mais ne réagit pas.
Pendant deux heures, malgré les propos entendus, les associations ont tenté d’expliquer que derrière "ces gens là" il y avait des familles qui travaillent, qui demandent un terrain pour lequel elles paieront loyer et charges. Sur les 40 à 50 riverains en colère, seuls 3 ou 4 avaient à la fin un discours apaisé, essayant de comprendre la situation.
La situation semblant calme, les associations quittent le terrain en disant aux familles d’appeler la police et des la prévenir en cas de problème, et surtout de ne pas répondre aux provocations.
Vers 22h 30, les familles du terrain, qui ont organisé un tour de garde, voient les jeunes alcoolisés de la manifestation revenir. Ils ont des bouteilles en verre à la main qui contiennent des tissus enflammés. Les jeunes les jettent sur le terrain en criant des insultes racistes. Apeurés et épuisés par ce harcèlement, les familles décident de plier bagage dans la hâte et retournent sur Saint Herblain. Elles laissent un frigo, une machine à laver ainsi qu’une caravane contenant un scooter, des vêtements et des papiers. Le propriétaire est en Roumanie. Quand son frère revient dans la nuit sur le terrain pour les récupérer, il voit des jeunes festoyer autour de la caravane en feu. A son retour de Roumanie, cette famille qui comprend des jeunes enfants ne retrouvera rien.
En 10 ans les familles disent n’avoir jamais vécu de telles horreurs. Elles ne comprennent pas ce déferlement de haine et de violences alors qu’elles travaillent et veulent juste assurer la sécurité matérielle de leurs proches.
Le 3 juillet, un des hommes du terrain est devenu papa pour la première fois. Il espère pouvoir offrir à son fils une autre vie que la peur, le racisme et le rejet.
(d’après le témoignage de Nina, éducatrice spécialisée aux CEMEA, coordinatrice du projet Tine Sol)
Alerté par les associations locales, le comité de Nantes du MRAP, membre actif du collectif Romeurope, adresse un signalement au procureur le 10 août, resté sans effet. Il décide début septembre par l’intermédiaire de son avocat maître Loïc Bourgeois de porter plainte pour injures à caractère raciste et destruction de biens d’autrui.
Documents joints
- Ouest-France (PDF – 327 ko)