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Pont Transcouleur n° 87 octobre 2011 (édito)
jeudi 29 septembre 2011
Y a-t-il des limites à la surenchère raciste et xénophobe du gouvernement ?
Cet été 2011, Monsieur Guéant, Ministre de l’Intérieur, s’est livré à un florilège de déclarations qui stigmatisent violemment les immigrés, qu’ils soient Français ou étrangers.
« Les deux tiers des échecs scolaires, c’est l’échec des enfants d’immigrés »
« Les délinquants roumains représentent un déféré sur dix à Paris, et près de la moitié des interpellés sont des enfants ou des adolescents »
« Le quart des étrangers qui ne sont pas d’origine européenne sont au chômage »
Et, à Marseille, « il y a une immigration comorienne importante qui est la cause de beaucoup de violences »
Il y a dans tous ces propos une véritable incitation à la haine raciale, des discriminations et diffamations à caractère raciste.
La France interdit les statistiques ethniques. D’où M. Guéant sort-il ses chiffres sur l’échec scolaire ? L’OCDE qui n’est pas vraiment un organisme gauchiste souligne « les élèves issus de l’immigration sont doublement pénalisés. Ils vivent dans un milieu social défavorisé et fréquentent un établissement au profil socio-économique plus défavorisé ». L’école creuse encore les inégalités sociales plus qu’elle ne les corrige.
Qui est responsable de cet état de fait, sinon le gouvernement qui supprime 16 000 postes d’enseignants et fait subir aux populations les plus pauvres les conséquences de sa désastreuse politique ultra-libérale ?
Qui, sinon le gouvernement, empêche les familles Roms, roumaines ou bulgares, de travailler en multipliant les obstacles insurmontables pour obtenir un emploi : durée limitée à 3 mois pour y parvenir, versement par l’employeur d’une taxe de 900 euros à l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration), délais interminables pour constituer les dossiers... Comment reprocher à ces personnes d’avoir recours à des expédients pour survivre !
Qui, sinon le gouvernement, met tous les délits dans le même panier, confondant le simple défaut de titre de séjour, la mendicité ou la vente à la sauvette qui ne mettent pas en cause la sécurité des personnes, avec les agressions et activités mafieuses ?
Que penser de la nomination de Monsieur Arno Klarsfeld au poste de Directeur de l’OFII ? Il a laissé aux associations de défense des droits des étrangers un bien mauvais souvenir : en juillet 2006, M. Sarkozy, alors Ministre de l’Intérieur, l’a nommé « médiateur du gouvernement » pour l’application de la circulaire permettant de régulariser des familles ayant des enfants scolarisés. Cette régularisation fut illusoire pour beaucoup de familles et M. Klarsfeld ne s’était pas illustré alors par sa volonté de résoudre des problèmes humains douloureux.
On peut d’ailleurs toujours douter de cette volonté : mercredi 21 septembre 2011 sur France Inter, il répond à une journaliste qui l’interroge sur les 30 000 reconduites à la frontière, arbitrairement décidées cette année « les préfets ont besoin d’un aiguillon… [ sinon] ils ne font pas ce travail de renvoyer, non pas vers la mort, non pas vers Auschwitz... ». Quelle franchise pour dire que les préfets ont du mal à faire « le sale boulot » !
Cette politique entretient en France un climat détestable, qui légitime trop souvent dans l’opinion publique le racisme et les discriminations.
Malgré la loi qui les interdit, les discriminations persistent largement. A compétences égales, quatre fois sur cinq, les employeurs choisissent, hélas, le candidat en fonction de son patronyme, sa couleur de peau, son lieu de résidence...
Un fait, tout récent, illustre bien cette injustice de la société et la désespérance des populations discriminées : une maman a obtenu de la justice de changer les prénoms de ses enfants, espérant pour eux un avenir meilleur.
Il est urgent que tout cela change. Le MRAP se bat pour que , demain, les parents n’aient plus à changer les prénoms de leurs enfants, pour que cessent les discriminations, à commencer par celles que pratiquent certains politiques, au plus haut niveau de l’État.
Le MRAP se bat pour une société autre : tous pas pareils, et tous égaux.